E-Reputation Law - a case study on e-reputation

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E-Reputation Law

Réaction constructive : droit de réponse et stratégies de réponse

Dans le cas fictif, ayant découvert une photo et un message nuisibles, Janssens-Quidam s’était contentée de publier une réponse sur ses propres pages web. Aurait-elle pu le faire ailleurs également ?

En droit belge, la problématique du droit de réponse est régie différemment selon le type de média utilisé (presse écrite, médias audiovisuels et interne)  [Note: P.-F. Docquir, « Le ‘droit de réponse 2.0’ ou la tentation d’un droit subjectif d’accès à la tribune médiatique », Rev. dr. ULB 2007/1, p. 303.]. Ceci a pour conséquence que contrairement à la situation dans d’autres pays  [Note: Dont la France, où le droit de réponse sur internet est organisé à l’article 6-IV de la loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 (disponible en ligne).], il n’existe en Belgique aucune réglementation du droit de réponse sur internet.

Ceci implique qu’une entreprise mentionnée dans un article sur un site web ne pourra pas en principe exiger la publication d’une réponse, alors qu’elle aurait pu le faire si l’article avait été publié dans la presse écrite.

Par conséquent, dans l’exemple de Janssens-Quidam, celle-ci n’aurait pu exiger la publication d’une réponse à l’article de Patrick contenant la photo d’une usine exploitant des mineurs et des commentaires par rapport à l’origine de la fourrure.

L’absence d’un véritable droit de réponse sur internet ne retire cependant en rien la possibilité d’une réponse.

Nous avons vu que l’e-réputation est avant tout une question de communication. Il s’agit donc pour l’entreprise de trouver une manière de communiquer de façon à minimiser l’impact du message nuisible. Cette communication, qui servira de réponse au message nuisible, peut se décliner sous plusieurs formes.

(a) Demande de rectification

Une première possibilité concerne le fait de demander la rectification d’informations fausses.

Ainsi, si l’auteur du message nuisible (Patrick) était le propriétaire du site sur lequel le message apparaissait, Janssens-Quidam aurait pu tenter d’une part de poster une réponse publique au message (possibilité de plus en plus présente sur internet, de nombreux sites web permettant d’écrire des commentaires en réaction aux articles publiés) et d’autre part de contacter Patrick en l’invitant à rectifier les informations fausses.

Si l’auteur du message n’était pas le propriétaire (des exemples d’intermédiaires seront examinés ultérieurement), il demeurait possible pour Janssens-Quidam de contacter le propriétaire du site web pour l’informer de cette réponse et le sommer de rajouter une notice en début d’article pour indiquer que le contenu de l’article était vigoureusement contesté.

Janssens-Quidam aurait également pu être entièrement transparente par rapport à ce processus et parler de ses tentatives de contact sur son site web.

En outre, il était possible pour Janssens-Quidam de répéter ce processus par rapport à tout site web répercutant l’information fausse.

(b) Conversion du négatif en positif

L’entreprise peut également tenter d’utiliser le courant négatif à son avantage, plutôt que de devoir se présenter comme « se défendant ». Cette stratégie de réponse consiste à répondre à un message négatif par un message positif.

Par exemple, Janssens-Quidam aurait ainsi pu annoncer qu’en raison du message, et malgré son caractère non fondé, elle avait décidé de soutenir l’association GAIA dans sa campagne contre l’usage de la fourrure ou encore que Janssens-Quidam allait augmenter le salaire des travailleurs (tous majeurs) de son usine en Asie.

En effet, reconnaître ses faiblesses et chercher à y pallier peut redonner confiance dans l’entreprise. On songe ainsi à l’exemple de La Redoute. Après la découverte d’un homme nu en arrière-plan d’une photo à la une du site web de La Redoute, celle-ci a été propulsée à la Une médiatique contre son gré. Un concurrent (3 Suisses) avait réagi le premier, apposant un maillot de bain sur la photo du nudiste. La Redoute a rebondi de manière positive, diffusant un mea culpa audiovisuel à l’humour décalé sur internet et organisant un concours pour les internautes. Cette réaction a généré à son tour un « buzz » positif sur internet.

Mobistar fournit un autre exemple : après l’émission flamande Basta! de janvier 2011 ayant critiqué avec humour les longues attentes téléphoniques que devaient subir les clients Mobistar, l’entreprise a engagé 127 agents supplémentaires pour sa centrale téléphonique  [Note: Voy. Mobistar, Résultats du premier semestre 2011 Mobistar, p. 11 (disponible en ligne).]. On peut toutefois se demander si la réaction n’est pas venue trop tard et avec trop peu de bruit, de sorte que les améliorations apportées n’ont pas eu tout l’impact qu’elles auraient pu avoir en termes d’e-réputation.

(c) Réponse personnalisée

Enfin, dans la mesure du possible, il est recommandé à l’entreprise de (rapidement) fournir une réponse personnalisée aux messages négatifs.

La société Telenet a ainsi révélé en février 2011 la structure qu’elle avait mise en place pour tenter de répondre rapidement et efficacement aux messages négatifs diffusés par les consommateurs sur internet. Selon la procédure décrite, une équipe de quatre personnes (à l’époque) scanne les médias sociaux pour savoir ce que dit le grand public au sujet de Telenet. Si un problème s’accentue, Telenet répond au consommateur, soit sur la base d’une liste de réponses à des questions fréquemment posées, soit après discussion en interne. Selon Telenet :

Les clients Telenet apprécient que nous nous occupions d’eux en personne. […] Nous ne sommes pas actifs sur les médias sociaux parce qu’il se fait que c’est la mode aujourd’hui. Pour nous, il s’agit d’une manière excellente de soutenir des processus existants ; ce n’est pas un canal de communication en tant que tel.
[…] Les consommateurs sont très stricts avec une société qui fait une erreur, mais si vous construisez de bonnes relations avec eux, vous verrez que d’autres consommateurs vous défendent spontanément si quelque chose se passe en effet mal.
 [Note: Traduction libre des propos de Leentje Chavatte de Telenet, dans une interview par Clo Willaerts (disponible en ligne):
“Telenet customers appreciate our dealing with them personally. […] We’re not active in social media because it happens to be fashionable today. For us it’s an excellent means for supporting existing processes; it’s not a communication channel in itself.
[…] Customers are very strict with a brand that makes a mistake, but if you build up good relationships with them, you will see that other customers spontaneously stick up for you if something does goes [sic] wrong”]

(d) Le pour et le contre d’une stratégie de réponse

Les avantages d’une stratégie de réponse (qu’il s’agisse d’une « conversion négatif-positif » ou de la réponse personnalisée) sont importants, puisqu’elle permet de créer ou renforcer l’image d’une entreprise à l’écoute et de rectifier des problèmes avérés. Elle transforme le message potentiellement nuisible en une question ayant donné lieu à une réaction positive. En outre, la réaction positive sera une source de « earned media », puisqu’un consommateur satisfait par une réponse risque fort d’en parler positivement dans son entourage ou mieux sur internet.

Les désavantages d’une stratégie de réponse sont principalement d’ordre organisationnel et financier : la mise en place d’une stratégie de réponse efficace exige du temps et du personnel dédié à cette tâche.

Dans certains cas, la réaction constructive face à un message négatif peut s’avérer insuffisante. L’adoption d’une réaction destructive peut alors être la solution.